Au Pérou, malheureusement, l’État ne reconnaît pas les territoires intégraux des peuples autochtones et ne les dote d’aucun statut juridique. Les familles installées par groupes tribaux sont reconnues, ou peuvent obtenir un titre de propriété, en tant que communautés natives. Voilà donc une des problématiques puisque l’État n’octroie de titre que sur l’endroit où elles sont installées, et toute l’étendue de leur territoire, là où elles se déplacent, est laissée à la libre disposition de cet État.
Dans le contexte du processus d’attribution de titres aux communautés, ou plutôt sur les terres où elles vivent, et bien, lorsque l’État péruvien arrive et les trouve installées quelque part, il leur attribue un titre uniquement sur la partie agricole et la partie où elles pratiquent l’élevage, de bovins ou de toute autre espèce. La zone forestière ne fait l’objet d’aucun titre, mais de contrats de cession d’utilisation.
À ce jour, au Pérou, la demande de délivrance de titres fonciers aux communautés natives est toujours très forte et concerne une moyenne d’environ 680 communautés, et à peu près 150 communautés réclament la reconnaissance de leurs terres. Voilà donc la situation du pays, et l’autre point est qu’il n’y a pas de financement direct pour les entités de l’État chargées des titres fonciers, c’est-à-dire les directions régionales de l’agriculture, ni un service avec suffisamment de personnel pour s’occuper de ces processus qui puissent au moins reconnaître les terres sur lesquelles sont installées ces familles appartenant à un peuple autochtone et leur délivrer un titre foncier.
Et bien sûr, ces terres où elles sont installées, comme il n’existe aucun document légal permettant de prouver qu’elles sont reconnues ou que les communautés natives ou familles qui y sont installées par communauté en sont propriétaires, et bien, subissent une pression très forte de la part de personnes extérieures qui migrent vers la forêt et les envahissent pour y pratiquer l’agriculture ou d’autres plantations, légales ou illégales. Et encore une fois, il est évident que lorsqu’il y a des projets liés à l’industrie extractive ou aux infrastructures publiques sur les terres où se trouvent ces familles autochtones et qu’il n’y a aucune sécurité juridique, celles-ci risquent évidemment d’être déplacées.
Cela fait deux ans qu’avec RRI, nous mettons en place le projet intitulé « consolidation territoriale ». Ce projet est consacré à la reconnaissance, à l’attribution de titres fonciers et à l’extension du territoire des communautés natives pour sauvegarder ces terres, afin qu’elles ne soient pas envahies ou que ces familles installées sur une portion seulement de leur territoire ne soient pas déplacées.
L’objectif du projet est de faire reconnaître la propriété des terres et de les garantir au profit de ces familles installées, et également de mettre en place des mécanismes de suivi pour que les communautés natives commencent à faire le suivi des atteintes subies sur les terres dotées d’un titre foncier ou celles où les communautés sont installées, ainsi que dans les zones dans lesquelles elles se déplacent, par exemple en relevant les cas de pollution environnementale liée à des déversements de pétrole ou de mercure, aux incendies forestiers, etc. Elles peuvent également alerter sur les cas de déforestation et de dégradation des sols sur leurs territoires, et aussi sur d’autres variables dans le domaine de la santé, de la traite des personnes, du trafic de terres ou encore de faune et de flore.
En résumé, le projet cherche à garantir la propriété foncière aux communautés natives, ainsi qu’à leur fournir des mécanismes de suivi pour qu’elles puissent surveiller leur territoire, en même temps qu’elles mènent leurs activités quotidiennes, qu’il s’agisse de terres sur lesquelles elles possèdent des titres de propriété ou du territoire sur lequel elles se déplacent.
Le projet est en cours depuis plusieurs années et, en 2023, neuf communautés autochtones ont bénéficié d’un soutien direct. Bien que l’objectif principal soit d’intervenir auprès de neuf communautés, des actions ont été menées avec un total de 14 communautés. Parmi celles-ci, trois nouvelles ont été officiellement reconnues, huit ont obtenu des titres fonciers, et le géoréférencement a été finalisé pour trois d’entre elles.
Lors de la quatrième année du projet, des processus de développement physique et juridique sont actuellement en cours pour neuf communautés supplémentaires. Concernant le suivi, en 2023, le projet a mis en place neuf modules de surveillance et créé neuf comités de vigilance. Ces communautés sont désormais en mesure d’envoyer des alertes en temps réel sur les événements qui les concernent.
Pour 2024, le projet a déjà lancé des interventions sur le terrain pour la reconnaissance et l’attribution de titres dans d’autres communautés. L’équipement destiné aux modules de surveillance a été acquis, et leur installation débutera le mois prochain, avec la mise en place de neuf modules supplémentaires dans les communautés identifiées.
L’une des avancées majeures a été l’installation d’un accès Internet par satellite dans ces communautés isolées, leur permettant de se connecter au monde extérieur en temps réel.